Réussir sa vie (du premier coup)

Un mien beau-frère (l’un des six encore en activité), avec qui je me trouvais cet été au mariage d’une commune nièce, a pris cette photo de moi étendu sur le pont d’une goélette alors que je venais de barboter dans la mer Egée. Il me l’a envoyée assortie du commentaire suivant : « Un homme heureux 😃 ! Ayant réussi sa vie sans le manuel ! »

Je me réjouis de donner cette impression. Est-elle juste ? C’est peut-être ce que je m’efforçais de vérifier à la lecture de cet ouvrage intitulé Réussir sa vie du premier coup*.

Si l’on ne me voit pas rire, alors que ce livre est très drôle et parodie brillamment tous les ouvrages de développement personnel dont nous inondent depuis quelques années une multitude de coaches, psychologues, philosophes et autres maîtres (soi-disant) spirituels, c’est sans doute qu’à ce moment-là j’en suis encore aux lignes qui résument le constat initial de l’auteur :

« Vivre est devenu aujourd’hui un objectif à part entière auquel il convient de consacrer une bonne partie de sa vie, ce qui nous laisse de moins en moins le temps de vivre. On ne vit pas, on DOIT vivre (…)
Nos ancêtres n’étaient pas contraints à une ambition aussi extravagante (…) et se contentaient la plupart du temps d’éviter de mourir, et de se reproduire (…) sans avoir en même temps à se soucier de quelque chose d’aussi dérisoire et incertain que leur pauvre épanouissement personnel. »

C’est une observation qui me paraît fort juste, et qui en dit assez long sur le caractère de notre époque pour qu’on n’y trouve pas uniquement matière à rigoler.

 

* Réussir sa vie du premier coup, “the ultimate guide”, par Yves Cusset, éditions Flammarion

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Bertrand de Foucauld

Bonjour Jean-Pierre. Merci pour ces remarques qui ne manquent pas d’esprit, comme de coutume. Si j’avais pu lire ces phrases quelques années plus tôt, ces dernières m’auraient apporté un éclairage bien utile.
Je pense que pour bien “réussir sa vie”, chacun est appelé, dans le contexte où il se trouve, à suivre ce qu’il porte en lui et à l’offrir au monde, avec courage et persévérence. Du coup, des liens se tissent, un horizon est donné, un sens transcendantal nous est offert, un soleil nous éclaire malgré les orages, les tempêtes, les inondations et autres catastrophes. Même notre soeur la Mort nous annonce l’espérance de l’éternité.
Alors oui, les notions de “premier coup”, de “temps qui reste”, de pourcentage de vie consacré à telle ou telle activité laissent apparaître leur vanité dt prêtent éventuellement à sourire. Suivons notre coeur et la Vie, dans ce monde et dans l’autre, fera le reste.