Paradis emmiellé

Salman Rushdie a été poignardé en fonction d’une fatwa prononcée contre lui et ses éditeurs par l’ayatollah Khomeini, qui appelait « tous les musulmans zélés à les exécuter rapidement, où qu’ils les trouvent, afin que personne n’insulte les saintetés islamiques », et qui ajoutait : « celui qui sera tué sur son chemin sera considéré comme un martyr ».

Son assaillant a doublement raté son coup. D’abord parce que Rushdie n’est pas mort, ensuite parce qu’il n’est pas mort lui-même. En conséquence, il n’accèdera pas (du moins pas tout de suite) au paradis de l’Islam et aux soixante-douze vierges promises aux chahids.

Mais je ne vais pas ironiser à mon tour sur la vision du paradis que propose le Coran. Je préfère convoquer Montaigne, et Pascal, qui ont il y a fort longtemps identifié le problème :

« Quand Mahomet promet aux siens un paradis tapissé, paré d’or et de pierreries, peuplé de garces d’excellente beauté, de vins, et de vivres singuliers, je vois bien que ce sont des moqueurs qui se plient à notre bêtise, pour nous emmieller et attirer par ces opinions et espérances, convenables à notre mortel appétit ». (Montaigne, Essais II, 12)

« Ce n’est pas par ce qu’il y a d’obscur dans Mahomet et qu’on peut faire passer pour un sens mystérieux que je veux qu’on en juge, mais par ce qu’il y a de clair, par son paradis et par le reste. C’est en cela qu’il est ridicule. Et c’est pourquoi il n’est pas juste de prendre ses obscurités pour des mystères, vu que ses clartés sont ridicules. » (Pascal, Pensées, liasse 16)

Ce que soulignent pertinemment ces deux auteurs, c’est qu’une lecture fondamentaliste du Coran se heurte frontalement avec la raison et l’esprit critique tels qu’on les cultive depuis la Renaissance en Occident. Si Dieu dit n’importe quoi, nous n’avons pas à le gober. Nous sommes libres, au contraire, selon notre caractère, de le dénoncer, ou d’en rire.

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Bruno SERIGNAT

Alors dénonçons l’imposture…