Au bord d’un engagement étonné

​Il m’arrive ces derniers temps de regretter d’avoir mené, disons, une vie trop aérienne. Une sorte d’étonnement s’est emparé de moi en prenant connaissance, à l’occasion des bouleversements politiques en cours, des portraits de tant de gens qui ont consacré une bonne part de leur existence au service des autres, se sont engagés pour une cause collective, ont fait passionnément leur métier, ne se sont pas résignés à ce que les lignes restent figées lorsqu’elles n’étaient pas belles, et ont de toutes leurs forces œuvré pour un peu plus de bien commun.

Moi qui ai jusqu’ici toujours été mû par un désir de distance et ne me suis jamais senti bien qu’à l’écart, je me trouve soudain pris d’admiration pour ceux qui n’ont pas comme moi délaissé « le monde et le bruit » pour « l’ombre et le frais ». J’envie, à ma surprise, ceux qui ont osé se lancer bravement dans le grand brouhaha des choses pour tenter d’y façonner quelque chose de bon.

Macron n’y est pas pour rien. Il me semble que c’est un personnage comme il ne s’en trouve en France qu’un ou deux par siècle, capable d’aimanter positivement les énergies d’un peuple et de faire entrevoir un meilleur possible. Son apparition sur la scène de l’histoire réveille, jusque chez moi, des élans citoyens naguère léthargiques. Je me souviens de l’impression qu’il m’a faite la première fois que je l’ai vu. C’était avant qu’il ne lance “En marche !” et sa campagne prodigieuse. Il avait cité les Grecs, et le combat. Plus tard, à plusieurs reprises, je me suis dit : va sur son site, adhère, soutiens-le. Je ne l’ai pas fait. J’ai jugé plus sage de me tenir de côté. D’ailleurs je ne bouge toujours pas, mais je confesse que, tout en résistant à ces démangeaisons d’engagement, j’en éprouve, moins vaguement que je ne l’aurais cru, une certaine mauvaise conscience, et le sentiment d’avoir tort.

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Michel Trihoreau

Le nouveau président est assez séduisant dans sa démarche et ses intentions et nous plonge dans un état de réflexion nouveau en politique. La perte des repères habituels est une bonne chose pour avancer. Une nouvelle image du jeu politique se dessine avec de multiples questions.
Peut-on aller contre la mondialisation ou plutôt trouver de nouvelles manières de s’adapter ? Faut-il aider à reconstruire l’Europe ? Mais sur quelles bases ? Le libéralisme est-il contrôlable ? Doit-on soutenir Macron pour recomposer un nouveau paysage, en acceptant notre incapacité à lutter contre le despotisme financier ? Doit-on au contraire favoriser une opposition plus conforme à nos aspirations, mais plus aventureuse ? Faut-il développer des stratégies pour éviter la barbarie lepenienne à moyen terme ou parier sur notre capacité à rebondir au moment opportun ?
La liste des questions n’est pas close. Il est urgent, je le crois aussi, de ne pas se précipiter et de garder la distance, tant cette période de réflexion est riche et jouissive, même si c’est une jouissance égoïste, mais la réflexion citoyenne est tellement rare depuis que le match entre deux camps mobilise nos neurones…

Bruno Sérignat

Macron : chronique d’un échec annoncé. Hélas, encore une déception à venir ! De ce fait, tu ne regretteras pas d’avoir choisi l’ombre et le frais.