Comment venir à une expo sans la voir

Michelle Vian avait fait parvenir à Claudine une invitation pour l’inauguration de l’exposition Boris Vian, qui avait lieu lundi à la Bibliothèque Nationale de France.

Quand nous sommes arrivés, il y avait foule. La file d’attente était donc très longue. Une personne de la fondation Boris Vian, patrouillant aux abords, reconnait Claudine, et nous fait signe de la suivre. Nous voici embarqués avec un petit groupe de VIP putatifs, traversant des couloirs, franchissant des portes. Au lieu de débarquer dans l’exposition par une entrée dérobée, nous pénétrons dans une salle de réception lambrissée et déserte, à l’exception d’un extra hiératique, debout derrière une table avec champagne et sushis.

bnf-vian.jpg

On nous laisse là, en nous confiant : – le “Président” arrive. Quel président ? Mystère. Puis d’autres groupes se présentent. Je ne sais pas s’ils ont déjà visité l’expo. Je ne sais pas si le “Président” est parmi eux. Soudain le champagne pète. Le buffet est ouvert. Claudine discute avec une ou deux personnes. Je patiente en buvant une coupe.

Un jeune homme souriant s’approche de moi. -Pardon, n’êtes-vous pas le réalisateur du film sur… (je ne comprends pas le nom qu’il me donne). – Non, désolé. – Alors, si je puis me permettre, qui êtes-vous par rapport à Boris Vian ? – Eh bien, je suis la femme d’une de ses biographes. Il rit de ma méprise. Moi aussi. Je n’ai pourtant bu que deux gorgées… – Pardon… Ma femme est l’une de ses biographes. Quant à moi, Vian, je l’ai chanté, dans un spectacle qui s’appelait “La fête à Boris“.

Un peu plus tard, je retrouve un éditeur renommé, avec lequel j’ai le plaisir d’échanger quelques nouvelles. Puis un couple rencontré à Vauvert, qui ne rate rien de ce qui concerne Boris Vian. Un homme coiffé d’un chapeau de cowboy devise bruyamment avec un de ses amis déguisé en explorateur. Des pataphysiciens, sans doute. Personne ne parle de l’expo. Personne ne vient nous chercher pour nous y emmener. Une heure a passé. Le “Président” ne s’est pas manifesté. Nous sortons de l’étrange salle d’attente. Un coup d’oeil à la queue : toujours trop longue. Nous remontons sur mon scooter. On reviendra un autre jour.

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muriel

Excellent, digne du Bison (qui en serait) ravi !!

Câline du baron

La vie ensemble, c’est ses chansons en mieux !
Ce soir là, Jean-Pierre était effectivement le prince « qu’on sort », un statut habituellement dévolu à l’épouse ; d’où le lapsus : « je suis la femme de…» qui n’aurait pas déplu à Boris. Comment
prendre l’habit du consort sans la bit (e) ? Ce travestissement (mental) a visiblement procuré un plaisir singulier à ma moitié.
Une expérience ‘pataphysique s’il en est. Dans la peau de la femme du biographe, s’amusant des tenues extravagantes et sans se départir de son esprit satirique habituel, JP observait le caractère
ubuesque de la situation avec un détachement que l’on voit rarement aux êtres du sexe fort dans une telle situation.
Notons au passage que l’adjectif consort est toujours au masculin, le prince ou la reine partagent le même (con)sort.

arbon

Tu as toujours des analyses d’une extrême finesse, chère Muriel. Je ne connais pas les raisons de mon lapsus, mais celles que tu évoques sont plausibles, et en tout cas j’ai envie d’y croire !

muriel

Je trouve ton lapsus « je suis la femme d’une de ses biographes » révélateur de la manière dont Claudine et toi vous situez l’un l’autre dans la vie publique.
Car pendant des années, Claudine a été l’infatigable productrice d’Arbon, lequel se produisait sous les feux de la rampe, elle était la cheville ouvrière de sa promotion, et bien qu’elle fut (et
reste !) toujours remerciée entre tous à tes concerts, c’était toi la “star”…
Depuis la parution de “Vian a 20 ans”, livre qui a dévoilé la pertinence et la verve de la plume de Claudine (qui, je crois le savoir, travaille ardemment à d’autres ouvrages) – elle a, elle aussi,
statut d’auteur.
C’est, à mon avis, ce que tu as spontanément et inconsciemment mis en avant en te présentant comme sa « femme », te mettant au second plan dans cet événement culturel – sans toutefois omettre de
citer ton propre rapport à Vian. (Bien que dans ton esprit, j’en suis persuadée, la femme de quelqu’un qu’on te présente ne soit pas considérée comme une personne de moindre importance : tu
utilisais dans ce lapsus un code conventionnel imprégnant ces cérémonies).
Ce lapsus ne témoigne-t-il pas de l’équilibre des ego dans votre couple, donc de l’harmonie de celui-ci !?

les cafards

et Vian dans tout ça ? Il jouait dans la pièce d’à côté ? Amitiés cafardesques

arbon

Tant que tu ne te prends pas pour la femme de ta femme…

Jacques Langlois

Oups, j’ai du moi aussi boire un petit coup de trop…Le commentaire bégaie…

Jacques Langlois

Voilà qui rappelle certaine chanson:
On n’est pas là pour se faire engueuler on est là pour voir le défilé
On n’est pas là pour se faire piétiner on est là pour voir le défilé
Si tout le monde était resté chez soi ça ferait du tort à la République
Laissez-nous donc qu’on le regarde
Sinon plus tard quand la reine reviendra
Ma parole nous on reviendra pas.

Jacques Langlois

Voila qui rappelle certaine chanson:
“On n’est pas là pour se faire engueuler on est là pour voir le défilé
On n’est pas là pour se faire piétiner on est là pour voir le défilé
Si tout le monde était resté chez soi ça ferait du tort à la République
Laissez-nous donc qu’on le regarde
Sinon plus tard quand la reine reviendra
Ma parole nous on reviendra pas.”