Notre-Père et tentation

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La question de soustraire aux regards les parties du corps qui éveillent les tentations est fort ancienne, et la littérature en parle abondamment. On connait ces vers de Tartuffe : « Couvrez ce sein que je ne saurais voir / Par de pareils objets les âmes sont blessées / Et cela fait venir de coupables pensées ».

En voici un autre exemple trouvé chez Marivaux (le Paysan parvenu) : « Je fus scandalisé l’autre jour de la manière indécente dont Mlle*** était vêtue. Peut-on venir à l’église dans cet état-là? Je vous dirai qu’elle me donna une distraction, dont je demande pardon à Dieu, et qui m’empêcha de dire mes prières. »

Le Notre-Père, dans la version qui avait cours dans mon enfance, s’efforçait de régler la chose en faisant appel à la force de caractère des fidèles, qui imploraient : « Ne nous laissez pas succomber à la tentation ». La version moderne est devenue moins héroïque : « Et ne nous soumets pas à la tentation.» Cet abaissement du niveau d’exigence est bien dans l’air de l’époque. Les vertus des vieux âges nous semblent de plus en plus hors d’atteinte. Plutôt que de résister, nous prions pour ne pas être tentés. C’est plus facile, et moins réaliste. On se raconte des histoires, on se défausse négligemment sur Dieu des épreuves que nous ne savons plus affronter par nous-mêmes. Le synéisaktisme est bien loin…

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