Sur ma voix et mes fesses

J’aurais aimé écrire un livre. Un roman ? J’ai essayé plusieurs fois. Ça s’est arrêté au bout de quelques pages. Ou refaire le coup de Montaigne, et transformer ce blog en Essais. Mais je n’y arrive pas. Creuser, entrer profondément dans les choses, en peser tous les tenants et les aboutissants pour et en sortir une vérité utile aux autres, demande un effort et une constance dont je ne suis pas capable. Tenir durablement un cap, je n’y arrive pas. Croire à l’importance de ce que j’entreprends, je n’y arrive pas. L’effort à fournir me parait d’autant plus grand que je n’ai jamais été réellement convaincu de l’intérêt de ce que j’avais à dire. Quand j’étais enfant, en classe, je ne levais jamais le doigt. Ni pour poser une question, ni pour donner une réponse. Les mots que j’aurais pu prononcer, je les jugeais superflus avant même qu’ils ne sortent de ma bouche. Alors, ils y restaient. J’étais bon élève, mais j’interagissais peu. Au fond, je n’ai jamais pensé que ma voix comptait. Étrange, n’est-ce pas, pour quelqu’un qui s’est voulu chanteur…

©  Robert Doisneau

Un jour, je suis allé proposer de nouvelles chansons à un producteur de musique. Il m’a demandé si j’aurais plaisir à les entendre à la radio. J’ai répondu que je n’en étais pas sûr. C’était une réponse honnête, et idiote. Qui veut miser de l’argent sur un artiste qui n’est pas persuadé que son œuvre est indispensable ? Personne. Ce n’est pas que je croie que mes chansons soient médiocres. Au contraire, je les crois bonnes, pour la plupart en tout cas. Mais c’est l’idée de s’imposer. Je n’aime pas m’imposer, ni m’exposer, ni m’interposer, ni poser tout court. « Des mots d’amour et des chansons : c’est bien là tout le nécessaire » : c’était la phrase d’accroche de ce blog. Je l’ai remplacée récemment (je me demande si quelqu’un s’en est aperçu) par « loin du monde et du bruit goûter l’ombre et le frais ». Ma vérité est là, dans ce vers de La Fontaine, ma vérité presque toute entière. Presque. Je suis assis sous mon arbre, il fait bon, je n’ai besoin de rien, la nature chante, tout va bien, sauf qu’un petit caillou me pique les fesses. Alors je songe que je devrais les lever, mes fesses, les remuer un peu, et me remettre à marcher.

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annick c

Je ne crois pas que tu n’aies rien a dire, tes chansons résonnent en nous.
“Que ton cœur reste ce qu’il est…”