Sur la vieillesse

La poétesse syrienne Maram Al-Masri a écrit sur la vieillesse ces mots qui me touchent :

« Elle m’a dit qu’elle viendrait, quand ? Je ne sais pas. Pourtant, elle viendra, c’est certain. Mais d’abord, il faudra qu’elle m’ôte l’éclat de mes yeux, la fraîcheur de ma peau, la plénitude de mes seins, l’humidité de mes passages, la brillance de mes cheveux. Elle devra me priver de l’envie de courir, de danser, de dénuder mes bras, de me regarder dans les miroirs (…)* »

Bouleversante « humidité des passages »… Inventaire des lieux et désirs intimes d’une femme où se joue une lutte perdue d’avance. La vieillesse est une corrosion. Le miracle d’un corps sain, beau et fonctionnel se dissout par paliers. Des douleurs apparaissent, des flaccidités, des sécheresses, des ankyloses. Moi-même, dans le silence de mon lit, ou dans mon souffle raccourci de marcheur, je la sens qui ça et là me ronge. De mois en mois, si je suis attentif, je peux en mesurer les progrès. Elle gagne, et l’on n’y peut rien.

Et la tête, que fait la tête ? Elle est en retard, elle ne s’y voit pas encore, elle se croit toujours jeune et dit au corps allez, remue-toi donc, ne renonce à rien. Ou bien elle est corrodée elle aussi, attention réduite, réactions ralenties, pensées enkystées, mémoire que désagrège par petites plaques l’acide méthodique du temps.

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AGUERRE G.

Et pourtant…! On arrive dans des plages immenses où les enjeux, les attentes sociales, les affaires à faire se sèment d’elles mêmes à chaque pas sur le sable. Le temps est doux, l’horloge est plus vaste que les heures, et les gens nous paraissent beaucoup plus importants. Renoncer nous rend légers et lumineux. Enfin, je crois…🌷