S’asseoir ou s’essuyer

La triste circonstance de la mort du grand Jean-Pierre Marielle a amené avec elle son lot d’éclats de rire, grâce à tous les extraits de films ou d’interviews qui ont fleuri sur les réseaux. Moi qui dis souvent des chansons de Brassens, j’ai été particulièrement heureux de découvrir la lecture qu’il avait faite de La fessée au théâtre de Sète en 2006.

On connaît l’histoire : une femme, dont le mari vient de mourir, veille le corps en compagnie d’un ami du défunt et bientôt, pipe et champagne aidant, Éros triomphera de Thanatos.

Marielle en connaît bien le texte, mais pas au point de le savoir par cœur. Il a besoin de lire son papier. Et tout son talent de comédien va s’engouffrer dans cet entre-deux : dans ce va-et-vient entre la scène telle qu’il se la remémore et l’imagine à mesure qu’il la lit, et la réalité des mots qu’il prononce. Il a des hésitations infimes, et joue de ces menus écarts entre ce qui se lit et ce qui se parle, et sa prestation majestueuse et acrobatique culminera dans un lapsus formidable, génial, mariellien en diable, où s’asseoir et s’essuyer deviennent une seule et même chose, et comment en effet rendre plus palpable toute l’excitation du désir ?

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