La Chalosse et les Chalossais

Aimery Picaud est l’ancêtre des routards. Il est l’auteur, vers 1150, du premier guide de voyage, en latin, à l’usage des pèlerins de Saint Jacques. Comment les pèlerins manipulaient-ils ce guide, alors qu’à cette date l’imprimerie est encore très loin d’être inventée ? Je me le demande bien. Ils ne le transportaient certainement pas dans leur besace. A dos d’âne, peut-être ?

Quoi qu’il en soit, l’un des chemins qu’il décrit passe par les Landes. A l’époque, ce n’est pas une forêt : ce sont des terres pauvres et sablonneuses alternant avec des marais insalubres. Il faut plusieurs jours d’une marche ennuyeuse pour traverser ces immensités inhospitalières, plates et désolées. Et puis, enfin, on arrive en Chalosse, pays « riche en pain blanc et en très bon vin rouge, [et] couvert de bois, de prés, de fleuves et de sources pures ». Bref, on est content d’avoir quitté les landes et de se retrouver dans un lieu qui, par contraste, ressemble au paradis.

Le géographe Pierre Duval, cinq cents ans plus tard, en 1651, ne dira pas autre chose : « La Chalosse, quoy que voisine de la Lande, est beaucoup meilleur pays, & cede à peu d’endroits, je ne diray pas seulement de France, mais d’Europe pour la fertilité. »

brassempouy

Cependant notre moyen-âgeux routard ne se contente pas d’admirer le paysage : il rencontre aussi les habitants. Il les trouve « légers en paroles, bavards, moqueurs, débauchés, ivrognes, gourmands, mal vêtus de haillons et sans argent ». Cela ne sonne pas vraiment comme un chapelet de qualités, mais nous lui laisserons la responsabilité de ses propos. Picaud note toutefois que les Chalossais « sont entraînés au combat et d’une grande hospitalité envers les pauvres ». Enfin, pour ce qui est du gîte et du couvert, il écrit : « Assis autour du feu, ils ont l’habitude de manger sans table et de boire tous au même gobelet. Ils mangent et boivent beaucoup et sont mal vêtus. Ils n’ont pas honte de coucher ensemble sur une mince paillasse pourrie, les serviteurs avec le maître et la maîtresse ».

S’il revenait visiter la région de nos jours, notre voyageur constaterait que cette rusticité extrême s’est considérablement adoucie, mais que le goût de la convivialité est resté. Je ne crois pas qu’on trouve dans son guide de mention d’Amou, et sans doute n’y est-il pas passé. Amou se situe à l’extrême sud de la Chalosse. Dix kilomètres plus au sud et nous sommes à Orthez, en plein Béarn. D’ailleurs, la rivière qui coule à Amou s’appelle le luy de Béarn (prononcer leuil). A quelque distance en aval du bourg, elle rencontre le luy de France, qui a son cours plus au nord. Ensemble ils forment le Luy tout court, qui va se jeter dans l’Adour.

Les routes de France et de Navarre, et leurs rivières, c’est à Amou qu’elles se rejoignent. Du moins, c’est ce qu’il me plaît de penser. Je vous tire donc pour aujourd’hui ma révérence, et m’en vais les suivre, au hasard. Et dans quinze jours, pour le festival, j’espère que nous serons nombreux à nous y retrouver.

Citations d’Aimery Picaud et de Pierre Duval extraites de l’article Chalosse sur Wikipedia

 

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Anna Gabrielle Diatta Dupuy-Diattajo@yahoo.fr

C’est le premier texte que je trouve avec une histoire de la Chalosse, très intéressant et qui me paraît très juste, nous qui sommes des descendants des Dupuy et Ducourneau de Amou-en-Chalosse, nous constatons que la famille a conservé ses qualités et ce qui pourrait être des défauts. Merci. Anna Dupuy Diatta.