Comment l’administration fait face aux « bouleversements qui s’annoncent »

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Le Centre d’analyse stratégique est un organisme rattaché au Premier ministre : c’est l’avorton technocratique du Commissariat général au plan, auquel il a succédé. Il travaille actuellement sur un beau sujet : “l’écrit à l’heure numérique”, en partenariat avec le Centre national du livre.

Le mois dernier, ses équipes ont jugé utile de m’auditionner. Je livre ici le courrier que j’ai reçu à cette fin.

« Le livre et la presse connaissent aujourd’hui une évolution technique majeure avec le développement de l’édition sous forme numérique. Des travaux sur le sujet sont déjà menés par divers organismes publics ou privés. Cependant, les données changent rapidement, au rythme des progrès permanents, et nous souhaitons approfondir plusieurs points d’intérêt général pour le pays. Quel rôle dans la diffusion de la pensée et la culture françaises joueront les acteurs de la filière du livre, auteurs, éditeurs, libraires, bibliothécaires ? Comment l’édition numérique permet-elle à chacun des acteurs de se rémunérer ? Quel sera le rapport à la lecture des générations nées à l’ère numérique ? Sur quoi s’appuiera la presse dans le débat des idées  ?
Nous aimerions recueillir votre point de vue et vos suggestions, à la lumière de votre expérience, sur les bouleversements qui s’annoncent ».
(Suivait le nom, non pas de la personne, mais des 9 ( neuf – ! – ) personnes qui allaient recueillir mes paroles. On ne mégote pas, quand il y va de l’intérêt du pays).

Admirable administration française, qui va son train placide, pose d’un ton docte de grandes et importantes questions, mobilise pour y répondre des fonctionnaires fins, courtois, érudits, et produit imperturbablement des rapports aussi intelligents qu’inutiles. On voit bien qu’elle perçoit confusément que son travail sera caduc avant même d’avoir commencé (elle parle de ces données qui changent rapidement, du rythme des progrès permanents), mais le décalage de vitesse qui existe entre le monde et elle, elle ne le mesure pas véritablement, elle croit qu’elle peut toujours faire avec. Elle se considère encore comme capable, dans sa technocratique lenteur, d’observer « les bouleversements qui s’annoncent », alors qu’ils ont déjà eu lieu. La poussière qu’elle distingue à l’horizon n’est pas celle d’un troupeau qui arrive, mais celle d’un troupeau qui s’en va. Et -le sait-elle ?- l’année qui s’ouvre est déjà la douzième du XXIè siècle.

Bonne et heureuse année à tous !

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Joelle

Meilleurs voeux à vous aussi Jean-Pierre, et à vos proches. Pouvons nous nous contacter par mail ?

les cafards

excellente année 2012
PS : la tortue se hate mais lentement

Jacques Langlois

Nonobstant l’illustration choisie, voila qui s’appelle soulever un lièvre!