Une marcheuse

Elle est arrivée avec ses chaussures de marche et son sac à dos, et elle a demandé si elle pouvait planter sa tente dans le jardin de la maison pour la nuit. La famille Plas, qui est hospitalière, lui a répondu oui.

Elle était grande, mince, la cinquantaine, visage carré, yeux bleus. Elle a remercié et commencé à s’installer. Malgré la saison le temps était au froid et à la pluie. Chez les Plas, on ne professe pas en vain de faire à sa table « un peu de place à l’étranger » : il fut offert à la marcheuse de partager notre repas.

J’étais assis à côté d’elle. Elle avait entrepris depuis quelques jours le tour du Cotentin. Nous avons parlé de la confiance : cette qualité qui fait qu’on est capable, comme elle, de partir le matin sans savoir où l’on s’arrêtera le soir. J’aimerais en être mieux pourvu. La véritable liberté est dans cet abandon. Quitter le contrôle, renoncer à prévoir, ne pas avoir peur de ce qui va advenir. Je le lui ai dit. Elle a souri. — Et si vous saviez, m’a-t-elle dit, comme les bonnes surprises arrivent vite…

La soirée s’est poursuivie tard. La famille (nous étions douze) a parlé, chanté. Pour finir, notre hôte n’a pas dormi dehors. « Pas pensable, surtout avec ce temps ! » a dit ma belle-mère. Claudine et sa sœur Bénédicte ont déployé le canapé-lit du salon.

Au matin, elle a repris la route. A Claudine, elle a laissé ce message : « Il pleut. Où vais-je trouver un endroit pour faire sécher ma tente ? Confiance et acceptation sont les vertus du randonneur. J’ai été si heureuse de partager cette soirée avec une famille vivante et bouillonnante. Merci ! »

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Brian Thompson

Belle histoire! Merci du partage. Si seulement davantage de personnes, de familles, suivaient votre exemple!