Une jolie étoile

Je repense à ma mère. A cette curieuse histoire qui s’est passée pendant la guerre, quand en 1942 les Allemands ont imposé aux Juifs le port de l’étoile jaune. Voilà Annie, la meilleure amie de maman, qui l’arbore fièrement sur sa veste. Maman ne veut pas être en reste. Elle s’en fabrique une le soir même. Et dès le lendemain, munies de leurs étoiles, elle et Annie descendent les Champs-Élysées bras dessus bras dessous.

Quand ses parents apprennent l’affaire, ils sont rétrospectivement morts de peur. Fureur contre leur fille. Maman ne comprend rien à la discrimination dont son amie est l’objet. Elles étaient deux jeunes filles de dix-sept ans : quelle différence y avait-il entre elles ? Pourquoi l’une et pas l’autre ? Et d’ailleurs, cette étoile sur la veste d’Annie, elle trouvait ça plutôt joli. Pourquoi n’aurait-elle pas la même ?

Solidarité et coquetterie, courage et frivolité… Elle continua à la porter quelque temps, en cachette. Puis Annie disparut, emmenée en déportation, d’où elle ne revint jamais.

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AGUERRE G.

Merci pour ces mots si forts, Jean-Pierre.
En arrivant d’Argentine (il y a plus de 30 ans) j’ai pris de plein fouet les histoires de la Résistance.
Qui ressemblaient étrangement à ce que je venais de quitter, militaires au pouvoir et des milliers de disparus. Ca m’a donné de la perspective, de la compréhension, de l’espoir.
On ne sait jamais, avant d’y être, de quel côté de la ligne on se mettra, lequel choix (qui n’est pas un choix mais un mouvement de l’âme) va se faire.
C’est souvent malgré nous.
Et c’est ce qui nous maintient vivants, droits, intègres, et à jamais unis aux autres.
Merci encore, JP, pour ton partage
❤️