Scènes de la vie des Légers (11) : Un poil, Pot au feu

 

Un poil, pas davantage

On a plaisir à discuter avec les Légers, car ils s’expriment avec un vocabulaire simple mais choisi. Ils évoquent, sans insister, et bannissent autant que possible de leurs propos tout terme frustre ou platement univoque. Ils manient l’allusion, la litote, l’ironie poétique, et considèrent comme une forme d’inconvenance le fait d’entrer dans des détails triviaux et précis, des chiffres par exemple.

Comme l’un d’eux vante avec éloquence à un Rutilant toutes les qualités d’un vin que produit l’une de ses connaissances, son interlocuteur en vient à la question du prix. – Très raisonnable, répond le Léger. – Certes, dit le Rutilant, mais combien ? – Oh, un poil plus cher, pas davantage.

*

 

Pot au feu

Un Rutilant raconte à un Léger qu’il vient de perdre un de ses amis. Le défunt, explique-t-il, a été « victime à petit feu » d’un AVC qui, il y a quelques années, l’avait « laissé légume ». Le Léger songe, malgré lui, à un pot-au-feu.

Le Rutilant précise ensuite qu’en réalité l’enterrement était une crémation : comme si (pense alors le Léger), on avait laissé mijoter trop longtemps, et exagéré la cuisson.

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(à suivre)

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