Paraphrase de Wang Wei

Tous les poètes ne descendent pas des fleuves impassibles : j’en connais un qui marche les pieds dans l’eau d’un ruisseau, à la manière de Socrate, mais qui, contrairement à Socrate, en remonte doucement le cours. Il s’appelle Wang Wei *. Il va vers la source, il se dirige vers l’origine, il part à la rencontre de l’essentiel, des éléments vitaux et des formes simples.

Arrivé au plus haut du cours, là où le filet d’eau n’est plus qu’un suintement de la terre, il s’assied, en amont de lui, sur le sol sec, et il attend. Ou peut-être marche-t-il encore, sur ces hauteurs, jusqu’à ce que la saison sèche altère le paysage et que la source se tarisse. Alors il se pose quelque part, là où le cycle de l’eau est interrompu, et regardant le ciel, il attend que se lèvent les nuages.

Il fait le lien. Il devient le chaînon qui aurait pu manquer, entre la pluie qui ne vient pas et la rivière qui a soif. Il boucle par sa présence l’ordre éternel des choses.

* Wang Wei (699-761) : « Marcher jusqu’au lieu où tarit la source / Et attendre, assis / Que se lèvent les nuages »

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