J’ai relu cette semaine un entretien que Christian Bobin avait eu avec un journaliste du Monde : « Il y a, dans ce que vous appelez joliment mon retrait, une part de caractère, une sorte de pudeur, et la crainte que la parole, en s’exposant trop souvent en plein jour, perde de sa vitalité. Rien n’est plus éblouissant que des traces de pattes de moineau dans la neige : elles permettent de voir l’oiseau tout entier. Mais pour ça, il faut la neige. L’équivalent de la neige dans une vie humaine, c’est un silence, une discrétion, cette distance qui permet le vrai lien. »
Puis j’ai lu le jour même, dans le même journal, que jamais la couverture neigeuse n’avait été aussi faible en cette période de l’année sur les Alpes et les Pyrénées. Des dizaines de milliers de kilomètres carrés de neige en moins. Le climat se réchauffe. Le bruit du monde augmente. La neige disparaît, le silence se fait rare. Comme d’ailleurs, aussi, les moineaux.