Mémoire et le Christ

Lendemain de Pâques. Il est dommage que la religion chrétienne ne contextualise presque jamais les fondements de son dogme. On nous présente la mort et la résurrection du Christ comme quelque chose d’absolu, d’inouï, de radicalement nouveau. On tient en pratique pour nul et non avenu tout ce qui a précédé. Toute foi antérieure (excepté le judaisme) est païenne et sans intérêt.

Pourtant, on a découvert autrefois en Crète dans d’antiques tombes des inscriptions gravées sur des plaques d’or que les morts portaient à leur cou. Sur l’une d’elles, trouvée sur une femme du Vè siècle av. JC, on lit ceci : « Maintenant tu es morte, et maintenant tu es née ». Peut-on exprimer plus clairement l’idée de la résurrection ?

Une autre inscription enseigne au défunt ce qu’il doit faire en arrivant à l’entrée de l’Enfer : « Ce mot sacré est de la déesse Mémoire pour ceux qui s’apprêtent à mourir. Tu iras dans les maisons de Hadès, bien construites. À droite, il y a une source. Près d’elle se dresse un cyprès. Il est blanc. Là descendent les âmes des morts (…) La source te demandera : — Qui es-tu ? D’où viens-tu ? Tu diras : — Je suis fils de la Terre, et du ciel couvert d’étoiles. Je brûle de soif, et j’en meurs. Elle te répondra : — Eh bien, bois de mon eau : je suis la source éternelle qui coule à droite du cyprès. Elle te donnera à boire l’eau du lac de Mémoire, et toi tu auras bu, et tu iras sur la route sacrée où marchent en pleine gloire les autres initiés. »

Ces initiés étaient des tenants des cultes orphiques. Ils descendaient sous terre au lieu de monter au ciel, mais ils témoignaient de leur croyance dans la vie après la mort dans des termes très proches de ceux des chrétiens. « En vérité, en vérité, je te le dis, à moins de naître d’eau et d’Esprit, on ne peut entrer dans le royaume de Dieu » dit l’Evangile (Jean, 3, 5). Je suis frappé par la similitude.

 

Sources :
 . Inscription crétoise relative à l’orphisme
 . Quand les dieux rôdaient sur la Terre / Orphée (podcast Radio France Pierre Judet de la Combe)

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Plas-Arbon

Le contexte est interessant sur le plan culturel et anthropologique, ainsi que les recoupements dans les croyances, notamment l’intuition d’une vie après la mort. Cependant le fondement de la foi chrétienne (dont il est question) est lié à la révélation de l’ancien testament, dont elle est l’héritière et le prolongement. Le Christ est juif. A Pâques, les chrétiens lisent le livre d’Isaï, notamment le texte prophétique du “serviteur souffrant”. Attester que Jésus est mort et ressuscité, qu’il est apparu pendant 40 jours à de nombreuses reprises à ses disciples (dont une fois à 150 d’entre eux), voilà le fait relaté par les témoins qui, pour beaucoup, ont subi le martyr pour nous transmettre leur foi – “Il est vivant ressuscité” et le message révolutionnaire du Christ contenu dans les évangiles.

Bruno SERIGNAT

Franchement, Jean-Pierre, comment peut-on encore croire en ces niaiseries d’un autre temps ?

Bertrand

Les exemples sont nombreux : les fils de Dieu chez les Egyptiens, les Grecs et les Romains comme chez les Germains et les Scandinaves font partie intégrantes de leur panthéon. En dehors de Pessah fête juive, la plupart des dates des fêtes “chrétiennes” sont calqués sur des celebrations païennes. C’est bien par ces nombreux “emprunts” que les pères de l’église et leurs successeurs ont adapté le judéochristianisme pour bâtir le pagano-christianisme bien plus acceptable par les païens et missible dans leur civilisation. Et ce sont ces adaptations qui ont fait le succès du Christianisme. Avant lui le judaïsme avait également emprunter aux Babyloniens et aux Egyptiens une bonne part de sa cosmogonie et de son dogme monotheîste. Et l’islam est né du judeonazaréïsme au 7eme siècle. Bref tous ont copié les uns sur les autres… ce qui est logique a une époque où l’imprimerie n’existait pas encore pour figer et diffuser le savoir au plus grand nombre. C’était déjà des fakenews mais les factcheckers étaient moins nombreux.