Les voleurs et l’âne (la place du pronom)

La (courte) fable « Les voleurs et l’âne » commence ainsi :

Pour un âne enlevé deux voleurs se battaient :
L’un voulait le garder; l’autre le voulait vendre.

Voilà un vers extraordinaire, quoiqu’il n’ait l’air de rien.

La syntaxe fait en effet qu’aujourd’hui le pronom complément d’objet se place juste avant le verbe auquel il se rapporte. Que le voleur veuille garder l’âne ou le vendre, grammaticalement c’est la même chose, donc : il veut le vendre, ou il veut le garder.

Mais au XVIIè siècle l’usage n’a pas encore tranché, et il est encore très fréquent, lorsque deux verbes se suivent, de placer le pronom complément d’objet du second avant le premier. Donc : il le veut vendre.

Ce qui rend ce vers génial, c’est que, justement parce que garder et vendre ne sont pas la même chose, La Fontaine souligne le conflit des voleurs en jouant avec les deux constructions dans le même vers : les voleurs tirent aussi à hue et à dia la position du pronom.

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