L’art d’Annie Ernaux

Je reviens sur Annie Ernaux et son prix Nobel. Je n’ai lu que deux livres d’elle : La Place et Les Années, en les enchaînant. C’était l’an dernier. J’ai aimé sans être transporté. En vérité sa façon d’écrire me fascine mais ne me séduit pas. Style blanc, phrases courtes, vocabulaire très simple : un dénuement délibéré, presque austère. Et pourtant tant de choses sont dites en quelques mots.

J’avais noté à cet égard une phrase de La Place (Annie Ernaux y revient sur son enfance, ses parents tiennent un café épicerie) : « On allait chercher le pain à un kilomètre de la maison parce que le boulanger d’à-côté ne nous achetait rien ». Ce refus du pain du voisin qui dit tout à la fois l’intériorisation du mépris, la rancœur confite dans le silence, un quant-à-soi dérisoire, le caractère pénible des représailles, et la médiocre fierté d’une vie mesquine et humble qui s’accroche comme elle peut à sa dignité, voilà ce qu’on peut appeler du grand art.

S’abonner
Notification pour
guest

1 Commentaire
Le plus récent
Le plus ancien Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Sérignat Bruno

Je n’ai lu (et encore pas jusqu’au bout) qu’un seul livre de cet auteur : pour moi, nombrilisme et surtout platitude absolue du style. N’est pas Céline qui veut !