La turbulence Rodin

Arte diffusera demain dimanche 2 avril La Turbulence Rodin, un documentaire de Leslie Grunberg et Claire Duguet réalisé à l’occasion du centenaire de la mort du sculpteur. Ayant eu la chance de le voir en avant première, je peux dire que le travail de Rodin y est filmé comme jamais. Ce qui m’a paru particulièrement bien rendu, c’est le génie sensuel de Rodin. La pierre devient chair avec lui. Même pour sculpter son Balzac, il étudie les corps pendant des années, part du moulage de la main de l’écrivain, recherche le « type » physique du Tourangeau un peu empâté, multiplie les esquisses, les approches. Alors, quand il s’agit de femmes…

Rodin, le Baiser (détail)

Ecoutez ce témoignage extraordinaire de la danseuse Isadora Duncan. Quand elle lui rend visite, il est un maître célèbre, elle a trente-sept ans de moins que lui. « Il me regardait de ses yeux brillants sous ses paupières abaissées, puis, avec la même expression qu’il avait devant ses œuvres, il s’est approché de moi. Il passa sa main sur mon cou, sur ma poitrine, me caressa les bras, passa ses doigts sur mes hanches, sur mes jambes nues, sur mes pieds nus. Il se mit à me pétrir le corps comme une terre glaise, tandis que s’échappait de lui un souffle qui me brûlait, qui m’amollissait. Tout mon désir était de lui abandonner mon être tout entier, et je l’aurais fait avec joie si l’éducation absurde que j‘avais reçue ne m’avait fait reculer, prise d’effroi, et le renvoyer, plein d’étonnement. Quel dommage ! Combien de fois ai-je regretté mon incompréhension puérile qui m’empêcha d’offrir ma virginité au Grand Dieu Pan. »

C’est un beau métier que celui de sculpteur. Du temps qu’il le pratiquait, Matisse avait noté un jour dans ses carnets : « C’était une jolie fille, un modèle parfait. Je palpais son corps, mes mains enveloppant les formes, et puis je transmettais à la terre l’équivalent de ma sensation ».

 

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