Aventin

En 494 avant JC, les Romains, qui ne sont encore qu’une puissance locale, ont des velléités d’expansion. Une guerre éclate avec les Volsques, leurs voisins du sud. Mais pour faire la guerre il faut de la piétaille, et la piétaille, cette fois, traine des pieds. La plèbe croule sous les impôts, est criblée de dettes, et n’a aucune envie de se battre pour les patriciens. Que font alors ceux-ci et leurs consuls ? Ils promettent de rendre la liberté à tous ceux qui sont devenus esclaves pour dettes et d’effacer l’ardoise de ceux qui s’enrôleront.

On voit que la guerre a peu changé. Prenez la Russie ces temps-ci : elle aussi a besoin de piétaille ; elle aussi, pour recruter, promet de l’argent aux conscrits et fait sortir de prison les détenus qui acceptent de se battre. C’est la méthode « Wagner ». (On fait mine de s’en indigner en Occident, mais les Russes n’ont rien inventé.)

Revenons à Rome. Elle est victorieuse. Mais sitôt qu’elle a remporté la bataille, elle oublie ses promesses. Les soldats dupés, furieux, se retirent sur l’Aventin, une des collines de la ville. Ils font grève, en quelque sorte, tandis que déjà les Volsques amassent des troupes pour prendre leur revanche. Les patriciens n’ont pas d’autre choix que de négocier afin de les convaincre de combattre à nouveau. De ce jour, la plèbe aura désormais son mot à dire dans la conduite des affaires. Des tribuns sont nommés pour la représenter. Ce sont eux qui, au Sénat, feront désormais entendre la vox populi. Rome devient réellement une république.

Notons que de cet épisode est restée l’expression se retirer sur l’Aventin, qui signifie grosso modo : « J’arrête de discuter, démerdez-vous, ce n’est plus mon affaire ». Notons aussi que jusqu’ici, personne n’a trouvé l’équivalent de l’Aventin à Moscou.

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Bruno SERIGNAT

…mais déjà les premiers “détenus volontaires pour le front” russes (ceux qui ne sont pas morts, évidemment) ont vu leur peine effacée…

annick c

Rien ne change sous le soleil..