Mérites comparés de la cocotte-minute et du fusil mitrailleur

C’est la force des medias, des images en direct, du nombre d’envoyés spéciaux et de correspondants : s’il se passe quelque chose de tragique aux Etats-Unis, on en entend parler comme si c’était chez nous. Le jour même du double attentat au marathon de Boston, (3 morts le 15 avril), il y a eu plusieurs dizaines de morts en Irak et en Syrie dans des conditions tout aussi tragiques, mais bon, ces morts-là étaient beaucoup moins intéressantes d’un point de vue télégénique, c’est-à-dire aujourd’hui commercial.

Sans même aller chercher des comparaisons au Moyen-Orient, il faut bien constater que d’autres formes de violence, souvent plus meurtrières encore, qui s’exercent aux USA, ne suscitent pas autant de questions. Mon ami John Whitbeck, qui est un observateur extrêmement subtil de la vie publique américaine, notamment dans son rapport au « terrorisme », fait remarquer (dans un article que je reproduis ci-dessous dans sa version originale), que si les deux frères Tsarnaev avaient perpétré leur forfait avec des armes à feu, l’événement aurait probablement été considéré comme infiniment regrettable, mais se serait inévitablement inscrit dans la grande série des fusillades meurtrières dont les conditions sont en quelque sorte garanties par la constitution (cf la tuerie de Newton, au fusil mitrailleur, en décembre dernier : 28 morts dont 20 enfants).

John fait également remarquer que dans la liste des motifs d’inculpation du suspect survivant figure l’utilisation d’une « arme de destruction massive », laquelle se révèle être, comme l’enquête l’a montré, une cocotte-minute. Du coup, la guerre d’Irak est a posteriori justifiée : on devait certainement pouvoir trouver quelques cocottes-minute dans les cuisines irakiennes du temps de Saddam Hussein.

cocotte-minute.jpg
A Puzzlement: Pressure-cookers vs. Guns
John Whitbeck
 
The “Boston bombings” are outside my normal range of reflection, but I will nevertheless share a sense of puzzlement over the extraordinary (over)reaction to these killings in a country where roughly one hundred people are killed every day by guns.
For whatever reasons, it appears that two young brothers chose to use exploding pressure-cookers to kill random people watching a sporting event.
Imagine, however, that, instead of using pressure-cookers, the same brothers had chosen to open fire on the crowd with assault rifles, killing the same three people (or even significantly more) and wounding a similar number of people.
It seems to me highly likely that such an attack with guns would have been viewed from start to finish as yet another regrettable but, sadly, periodically inevitable (and necessarily acceptable) abuse of the supremely important and constitutionally protected right to bear arms – in the grand, quintessentially American tradition of Columbine, Virginia Tech, Aurora and Newtown, among other recent bloody precedents.
It seems to me highly unlikely that such an attack with guns would have given rise to (i) instant labeling of the attack as “terrorism”, (ii) references and comparisons to the 9/11 events (“the worst terrorist attack on American soil since 9/11”), (iii) a government-ordered lock-down of the entire city of Boston, as well as several neighboring towns, while thousands of law enforcement officers searched for one known-to-be-wounded 19-year-old, (iv) non-stop media coverage, (v) calls by members of the U.S. Senate for the surviving presumed perpetrator (known to be an American citizen) to be declared an “enemy combatant” (presumably so that he could be tortured), (vi) indictment of the surviving presumed perpetrator for using a “weapon of mass destruction” (a pressure-cooker?) to kill and (vii) the flying of the American flag at half-mast at American embassies abroad.
Why should the METHOD used to kill make such a difference? Have Americans been conditioned (brainwashed?) to be willfully blind to the sort of lethal violence which poses a genuine, significant and constant threat to them and deranged with paranoia as to a sort of lethal violence (or simply a supremely subjective word which extinguishes the capacity for rational thought, analysis and action) which poses only an infinitesimal threat to them?
And if the brothers had lashed out with swords?
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2 Commentaires
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arbon

pas faux…

cepheides

Il est certain que la désignation d’une cocotte-minute (même bourrée de clous) comme étant une “arme de destruction massive” est grotesque. Sinon comment qualifier une bombe atomique qui peut anéantir des centaines de milliers de personnes ? Par ailleurs, il est certain que 3 morts aux USA dans un attentat est, journalistiquement parlant, bien plus rentable que les centaines d’Irakiens trucidés chaque semaine (Je me souviens de la marionnette des Guignols à tête de Stallone s’exclamant à propos des morts irakiens : mais, on s’en fout, c’est rien que des bougnoules ! On n’en est pas loin…). Cela dit, on critique les USA sur le 2ème amendement et leur laxisme sur les ventes d’armes mais, chez nous, où le contrôle est draconien, on n’a pas su empêcher Mohamed Merah et plus encore le cinglé qui vient de tuer 3 personnes “au hasard” à la kalachnikov dans le sud. Peut-être n’a t-on pas tant que cela de leçons à donner…