Comme ton pull

On dit parfois que la poésie est l’art de la comparaison. Le mot “comme” est ainsi celui qui revient le plus souvent sous la plume de Baudelaire dans les Fleurs du Mal.

La réciproque n’est évidemment pas vraie : ce n’est pas parce qu’on trouve le mot “comme” dans un texte qu’il prend des reflets poétiques.

J’ai été un jour contraint d’assister au concert d’un chanteur qui n’avait pas grand chose à dire, mais l’exprimait avec une intensité inversement proportionnelle à l’intérêt de son propos. Il mettait nos oreilles à l’agonie en hurlant des paroles ineptes qu’il envoyait avec un maximum de décibels (bien au-dessus de la limite autorisée, à mon avis) dans une sono saturée. A un moment j’ai entendu qu’il criait : Croire en l’avenir c’est énorme : c’est comme ton pull rangé dans l’armoire. Ça m’a frappé, cette phrase. Son non-sens. Son incongruité. Sa lourdeur vide. Mais le mot “comme” y trônait en majesté, clef de voûte d’un n’importe quoi surréaliste, indice infime et cependant indéniable que l’homme qui éructait sur la scène avait tenté d’articuler poétiquement sa pensée, en dépit de sa consternante confusion.

tricot-sandra-backlund.jpg

S’abonner
Notification pour
guest

2 Commentaires
Le plus récent
Le plus ancien Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Jacques Langlois

Ah, le pauvre chanteur, qu’est-ce qu’il se prend! Des noms, des noms! Ne serait-ce que pour nous épargner d’aller l’entendre, ignorant les risques que nous prendrions…
Bon, essayons, par pur esprit de contradiction, de comprendre ce qu’il voulait dire. Faute de contexte et ne disposant que cette phrase, apparemment maladroite, ce ne sera pas facile. Si,
effectivement, le pull est “énorme” et prend, même “rangé”, beaucoup de place dans l’armoire, OK pour dire que tout ça est lourd et bébête.
Mais si le pull renvoie à la foi dans l’avenir, c’est moins “vide”: elle est partie mais puisque l’aimée a laissé son pull dans l’armoire, elle reviendra peut-être….
Bon, d’accord, ce texte a peu de chances de figurer un jour au bac de français, car, comme disait l’autre, le pire n’est jamais sûr.

PLAS

Et si l’pull over, dans son armoire c’est tout “comme” ?