Papa et Tonton vont au One Two Two

Le One Two Two était dans les années trente la maison close la plus luxueuse de Paris.


Mon père m’a raconté comment il y était entré un jour, en compagnie de son petit frère.

A l’époque, ils n’avaient pas le téléphone chez eux. Or leur mère eut un jour à faire une commission urgente à son mari, leur père, qui travaillait aux Grands Magasins du Printemps, rue de Provence. Comme ils étaient scolarisés au lycée Condorcet, non loin de là, rue du Havre, elle les charge d’aller lui porter un petit mot, sur lequel elle griffonne le numéro de la rue.

Ils s’y rendent d’un pas décidé, se trouvent devant la porte d’un immeuble cossu mais banal, sonnent. Une dame vient leur ouvrir, qui manifeste une certaine surprise.
– Que venez-vous faire, les enfants?
– Nous cherchons Papa. Nous avons un message pour lui.
La dame est dubitative.
– Vous êtes sûrs qu’il est ici?
– Oui, Maman nous l’a dit.
Le doute de la dame cède la place à un léger embarras.
– C’est certainement une erreur.
– Non, il faut qu’on le voie.
– Mais comment s’appelle-t-il votre Papa?
– Pierre Arbon.
Soulagement de la dame.
– Je ne connais personne de ce nom-là.
– Pourtant Maman nous a dit qu’il travaille ici.
– Est-ce que vous connaissez le nom de son travail, à votre Papa?
– Oui, il est chef acheteur au Printemps.
La dame sourit, rouvre la porte. Et leur dit:
– C’est là, un peu plus loin, au 112. Ici on est au 122.

122… D’où le nom One Two Two. C’était en 1935. Mon père et mon oncle avaient respectivement 14 et 11 ans.

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arbon

En effet. A la fois un bazar et un hôtel de ville.

jacques langlois

Ils se croyaient au Printemps et sont tombés chez une bonne Samaritaine…mais les tarifs n’étaient pas bon marché.