Maman n’a rien dit ce dimanche, rien, pas même « bonjour mon grand garçon » quand je suis arrivé. Je suis resté quatre heures auprès d’elle, elle somnolait, et puis elle a tenu ma main, qu’elle a fixée longuement et caressée pendant peut-être une heure, comme si c’était un gros oiseau posé sur elle, mais elle n’a rien dit, elle a juste à un moment murmuré « je t’aime mon fils », rien d’autre, je lui ai répondu moi aussi je t’aime, tout le reste était silence mais qu’est-ce qu’il y avait de plus à dire, et quand je suis parti elle a regardé ma main s’envoler.

Ce qui m’étonne, dit Dieu, c’est l’espérance.
Et je n’en reviens pas.
Cette petite espérance qui n’a l’air de rien du tout.
Cette petite fille espérance.
Immortelle.
[…] C’est elle, cette petite, qui entraîne tout.
Charles Péguy
“Le Porche du mystère de la deuxième vertu”, 1912