La levrette en pal’tot

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En ces temps de grand froid, on voit à nouveau se promener au bout de leur laisse, dans les rues de Paris, de petits chiens emmitouflés dans leurs manteaux. Il y a cent cinquante ans déjà, cette vision mettait en fureur un certain Auguste de Châtillon, peintre et sculpteur, dont la seule oeuvre qui attira un moment l’attention sur lui fut – chose curieuse – un court poème, intitulé La levrette en pal’tot. On dirait du Jehan Rictus avant la lettre, c’est très proche du Soliloque du Pauvre et de Temps d’hiver.

Y’ a-t-y rien qui vous agace
Comme un’ levrette en pal’tot,
Quand y’ tant d’ gens su la place
Qui n’ont rien à s’ mett’ su l’ dos.

J’ai l’horreur de ces p’tit’s bêtes,
J’aim’ pas leurs museaux pointus.
J’aim’ pas ceux qui font leux têtes
Pass’ qu’iz ont des pardessus.

Ça vous prend un p’tit air rogue !
Ça vous r’garde avec mépris !
Parlez-moi d’un bon bould’dogue,
En v’la-z-un qui vaut sont prix.

Pas lui qu’on encapitonne !
Il a comm’ moi froid partout ;
Il combat quand on l’ardonne ;
Et l’aut’ prop’ à rien du tout !

Ça m’ fait suer quand j’ai l’onglée,
D’voir des chiens qu’ont un habit
Quand, par les temps de gelée,
Moi j’ai rien, pas même un lit.

J’en voudrais bien crever une !
Ça m’ f’rait plaisir, mais j’os’ pas.
Leux maît’s ayant d’ la fortune,
Y m’ mettraient dans l’embarras.

Ça doit s’ manger, la levrette.
Si j’en pince une à huis clos,
J’ la f’rai cuire à ma guinguette.
J’ t’en fich’rai, moi, des pal’tots !

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