V’là l’ temps où faut pas être à poil :
V’là l’temps d’hiver et ses duretés,
V’là qu’ceux qui tiennent la queue d’ la poêle
Viennent plaindre les Pauvres à la télé
V’là l’ temps rev’nu où dans la presse,
Entre deux pubs façon putain,
On va r’découvrir la Détresse,
Les morts de froid les crève-la-faim
V’là l’ temps où ceux d’ la politique
Vont s’refaire une virginité
Et pour ça, l’ moyen l’ plus pratique
C’est d’ chialer sur la Pauvreté
C’ qui va s’en évader des larmes
C’ qui va en couler d’ la pitié
Plaind’ les Pauvr’s c’est comme vendr’ ses charmes
C’est un vrai commerce, un métier
solo
Ah ! c’est qu’on n’est pas chiens en France,
On s’préoccupe des malheureux ;
Et dzimm et boum ! la Bienfaisance
Bat l’ tambour sur les ventres creux
Tenez r’gardez, nous, les artistes,
Les braillards, les écrivassiers
Se vautrer dans les sujets tristes
C’est une façon d’ gagner not’ blé
Parce que, les Pauvr’s, c’est un’ bonne cause,
Et qu’elle plait bien au populo ;
Jouer d’ l’émotion en vers en prose
Disons qu’c’est un peu not’ boulot
On est faux-cul, sincère peut-être
’S’en fout, la question n’est pas là
C’est le Spectacle qui règne en maître
C’est la société qui veut ça
solo
Ah ! toutes ces causes humanitaires,
Tout ce barnum de charité,
Sans tsunami famine ou guerre
Bien des gens s’raient dans la purée
Pinçons nos lyres à crocodiles
Entonnons l’éternel refrain
La Misèr’, faut pas s’ faire de bile,
Nous f’ra jamais manquer d’turbin
Car même Jésus l’a promulgué,
Paraît qu’y aura toujours d’ la dèche ;
Y’a pas qu’l’hiver que qu’chose empêche
Que l’ monde un jour il soit plus gai
J’peux bien dégoiser sans contraintes
J’ai pas fini de monter l’ son
J’ suis l’Homme Moderne qui pouss’ sa plainte,
Et vous savez bien qu’ j’ai raison…