Nous marchions à travers les collines, au milieu des fleurs et des buissons épineux. Le paysage était sublime et désert. Tout en bas se situait une petite crique que nous cherchions à atteindre afin de nous y baigner.
Nous y sommes arrivés au bout de trois quarts d’heure. Mer bleue, ciel bleu. Joie imminente du bain. Et soudain, sur la petite plage, un cadavre. Un corps, vêtu d’un t-shirt d’un pull noir et d’un jean, la tête enfouie dans le sable et les algues, le tronc gonflé en train de se putréfier après un long séjour dans l’eau, et des mouches.
Nous avons alerté le propriétaire de la maison où nous séjournions, qui a lui-même alerté la police. L’affaire était banale. Un bateau de migrants avait chaviré à trente milles au nord dix jours auparavant. Dans le secteur, on retrouvait depuis quarante-huit heures des noyés un peu partout. Ça ne méritait pas une enquête.
Nous sommes remontés chez nos hôtes. Le soleil commençait à baisser. La maison était comme le paysage : un sommet de beauté. Une réception était prévue. Les invités n’ont pas tardé à arriver. La nouvelle de la découverte du noyé fit le tour de l’assemblée. « C’est terrible / horrible / affreux ! » Tout le monde a vidé sa coupe de champagne avant de passer à table, et l’on a parlé d’autre chose. Moi aussi.
Moi aussi… Et pour une fois, j’ai regretté mon caractère accommodant et pacifique. J’aurais aimé qu’un imprécateur se lève, pour secouer les consciences et prononcer quelques fortes paroles. Pour s’indigner qu’on puisse voir à sa porte quelqu’un tué par la misère, et enchaîner avec le récit de ses dernières vacances ; qu’on puisse voir un mort de détresse et manger comme si de rien n’était. Pourtant, c’est bien ce qui s’est passé. Pour moi aussi.
Le mort, je m’en suis informé le lendemain, était une jeune Syrienne. Je pense à elle, à ses compagnons de malheur, passés, présents, futurs, à tous ces cadavres qui crient en silence et dérivent sans inquiéter les vivants.
(Ce que je raconte ici s’est produit il y a trois semaines, avant le récent naufrage au large du Péloponnèse d’un chalutier libyen avec sept-cent cinquante personnes entassées à son bord.)
Je m’indigne quotidiennement ! Nous sommes laches . Ces personnes sont des réfugiés, ces personnes ne sont pas attirés par nos modes de vie . Elles fuyent. Elles fuyent le malheur ! Et ça ne s’arrêtera pas ! La pression des mouvements de population subsaharienne augmentera à cause de l’avancée du désert causé par le dérèglement climatique et la famine qui s’étend !
Il faut absolument et par tous les moyens dissuader ces gens (98% de “réfugiés” économiques) de venir en Europe qu’ils croient encore être un eldorado…
Nous nous indignons un petit moment, de moins en moins longtemps…
Que faire, interpeller nos politiques?? au mieux ils tournent le dos, en réalité ils écoutent d’autres sirènes, plus profitables éléctoralement.
Le hasard du calendrier , ce matin ce message du CADA local : La collecte a atteint 77% de son objectif sur helloasso, mais de nombreux donateurs ont envoyé un chèque, aussi l’objectif fixé de 6000€ a été atteint, et même un peu dépassé.(…), une famille va pouvoir poursuivre son intégration en France (…) Une (autre) famille qui était prise en charge par les amis du CADA a été régularisée et a pu prendre un logement à son nom. Aussi l’appartement qu’elle occupait a été libéré, et une famille suivie par l’association va occuper ce logement.
Le colibri, rien de plus…Un vol de colibris…