Tristesse de l’humoriste

De quoi est fait le corps ? De viscères gélatineux, d’amas fibreux et muqueux, et, les os mis à part, de sécrétions et de liquides plus ou moins visqueux qu’on appelait autrefois les humeurs. Les Anciens en avaient fait une théorie, et en distinguaient quatre : le sang, la bile jaune (ou fiel), le phlegme (ou pituite) et l’atrabile. Le tempérament d’un individu était déterminé par l’humeur dominante de son organisme, laquelle pouvait varier en fonction de son âge ou de la saison. On avait ainsi les sanguins (emportés), les bilieux (aigris), les flegmatiques (lymphatiques) et les atrabilaires (chagrins).

Bien que rien de tout cela ne fût spécialement drôle, les adeptes de cette théorie des humeurs s’appelaient les humoristes. Ce terme, par extension, en vint à désigner non seulement les thérapeutes, mais tous ceux qui étaient sujets aux humeurs, et singulièrement à l’humeur maussade. Balzac écrit ainsi que la Duchesse de Langeais savait « se faire mélancolique avec les humoristes, gaie avec les insouciants, politique avec les ambitieux, guerrière avec les militaires ».

Jusqu’à ce que les Anglais nous empruntent le mot humeur et nous le retournent en ayant altéré le e en o, un humoriste, en bon français, était quelqu’un d’enclin à la tristesse. L’étymologie ne manque pas d’humour.

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