Prolongeant mes songeries d’hier, et confiné pour confiné, me suis-je dit, allons voir s’il y a des confinés dans les Fables. Eh bien oui : il y en a deux.
Le premier est un homme qui se croit très beau, mais qui ne l’est pas, ce que les miroirs qu’il rencontre ne cessent de lui dire. Comme il en rencontre partout, il les fuit et « va se confiner / aux lieux les plus cachés qu’il peut s’imaginer ». Reste l’eau, dans lequel ce paradoxal Narcisse ne peut s’empêcher de se voir (l’Homme et son image).
Le second est un « ours montagnard (…) à demi léché, confiné par le sort dans un bois solitaire ». Il y vit « seul et caché », ce qui le rend presque fou. « La raison d’ordinaire / n’habite point longtemps chez les gens séquestrés », note La Fontaine. Comme « il s’ennuyait de cette triste vie », et pour ne plus se « livrer à la mélancolie », notre ours quitte son confinement, et descend de sa montagne. C’est alors que sans le vouloir, il tue un de ses amis.
Ainsi résumée, on pourrait croire que l’histoire a été écrite pour l’édification des populations en temps de covid-19, et les inciter à garder leurs distances. Mais voici la vraie version : l’Ours et l’amateur des jardins.