Il y a des mots qui m’enchantent. Prenez déduit. C’est un terme charmant, quoique peu usité, pour désigner le plaisir sexuel. Je citerai deux témoins : Verlaine (Poèmes saturniens) :
De la douceur, de la douceur, de la douceur !
Calme un peu ces transports fébriles, ma charmante.
Même au fort du déduit, parfois, vois-tu, l’amante
Doit avoir l’abandon paisible de la sœur.
et Brassens (Le fantôme) :
Plus experte dans le déduit
Que certaines dames d’aujourd’hui
Et je ne veux nommer personne
Quand on emploie déduit, le plus souvent, c’est comme verbe, dans le contexte d’un raisonnement logique (de telle cause, on déduit telle conséquence), ou dans un contexte comptable ou fiscal (tel montant sera déduit de l’impôt). Quel rapport entre ces déduits – déductif ou déductible – et notre déduit amoureux ? Tous proviennent du même mot latin deducere, lequel, par glissements successifs, signifie « emmener », puis « retrancher, soustraire », puis « détourner de », et enfin « divertir ». Le divertissement par excellence, c’est l’amour.
Il y a dans le roman de la Rose un «Verger de déduit» (comprendre : un jardin d’amour) dans lequel un jeune homme s’éprend d’un bouton de rose. Est-il besoin de commenter l’image ?