Un « corbillat » était au XVIè siècle un coche d’eau qui reliait par la Seine Paris à Corbeil, et transportait, outre des marchandises, des bébés que leurs mères envoyaient pour quelques mois en nourrice à la campagne.*
Cent cinquante ans plus tard, en 1690, Furetière note dans son dictionnaire que le mot, altéré en corbillard, désigne désormais ironiquement « un carrosse bourgeois, où on voit plusieurs personnes fort pressées ».
Puis en 1798 l’Académie le définit comme un « grand carrosse utilisé pour les laquais d’un grand seigneur » et ajoute : « le Peuple appelle encore ainsi un chariot à transporter les morts ».
Des nouveaux-nés aux trépassés, de l’eau à la terre, on peut croire que le corbillard a achevé son parcours : pas tout à fait. Cent ans passent encore et l’argot s’en empare pour nommer ce qui a valeur de mort ou de destruction. Les « papillons de corbillard » de la guerre de 14 sont les éclats d’obus (qu’on appelait aussi « hirondelles de cimetière »). Quant à la prostituée malsaine auprès de laquelle on était sûr de contracter la vérole, elle obtient le délicat surnom de « corbillard à nœuds ».
* cf Pascal Quignard, La barque silencieuse
savoureux…