J’ai déjà évoqué le fait que Gainsbourg, aussi bien dans la musique que dans les paroles de ses chansons, s’inspirait souvent fortement, en le disant ou sans le dire, d’artistes qui l’avaient précédé.
Il a très probablement eu connaissance des écrits de Franc-Nohain, à qui l’on doit notamment cette petite fantaisie intitulée « Sollicitudes » :
Appétit vigoureux, tempérament de fer,
Membert languit, Membert se meurt, – ami si cher…
Qu’a Membert ?
Hé, Momille, bonjour ! Comment va la famille,
Le papa, la maman ?… Tu pleures jeune fille ?…
Qu’a Momille ?
Je viens de rencontrer, allant je ne sais où,
Outchou le professeur, qui courait comme un fou.
Qu’a Outchou ?
Fantaisie courte, puisqu’elle s’arrête là. Il eût été facile d’en faire des pages. Comme le note Alphonse Allais : Franc-Nohain « y met de la discrétion. Sachons l’en louer ».
L’ami Caouette, chanson (assez médiocre d’ailleurs) de Gainsbourg, sort directement de ce moule, qui reprend Membert et Outchou. Cependant, il fallait écouter Allais : avec les ajouts de Noé, Cao, Ramel, Binet, et compagnie, la discrétion s’est perdue.