Triste Brexit

Ce que j’ai toujours trouvé plaisant, chaque fois que je me suis rendu en Angleterre, c’est qu’on y est visiblement à l’étranger. Les distances s’y mesurent en miles et en pieds, les voitures roulent à gauche, et comme on y paye en livres il faut passer par un bureau de change : aucune autre destination ne vous offre un tel dépaysement à deux heures de train de Paris.

angleterre

Je doute que les Britanniques aient fait le bon choix en décidant de quitter l’Europe. Ils n’avaient jusqu’ici pas trop mal résisté à l’uniformisation du monde. Lorsque j’étais enfant, j’étais ébahi par la façon étrange dont ce pays comptait : la livre était divisée en 20 shillings qui chacun valaient 12 pence. Si cette singularité exotique a depuis disparu, l’Europe n’y est pour rien : la décimalisation de la monnaie* fut un alignement (à mon sens regrettable) sur un mode de calcul plus efficace et une soumission à la triste rationalité économique universelle. 

Comment défendre nos identités ? En luttant contre les forces qui les appauvrissent. Face à l’argent sauvage et à l’implacable loi du plus fort, cela suppose de s’unir. L’Europe ne s’oppose pas à la diversité, elle s’oppose au chacun pour soi.

*intervenue en 1971, deux ans avant que le Royaume-Uni ne rejoigne l’Union Européenne.

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Bruno Serignat

Je ne partage absolument pas ton point de vue : je suis persuadé que l’Union européenne, en mal de libéralisme extrême, n’a pour seul effet que l’uniformisation des peuples, souvent même en raison d’une immigration “bon marché” mais inassimilable. La conséquence en est à terme la multiplication des conflits, peut-être même le spectre de la guerre civile de type libanais alors que cette Europe était censée nous protéger des conflits (comme s’il n’y avait pas eu la paix entre 1945 et 1990). Qu’un vieux peuple comme l’Angleterre (et je dis bien l’Angleterre) ait confusément senti l’avenir mortifère de son union avec l’Europe m’étonne encore (je remarque que ce sont les “vieux” qui ont fait machine arrière et ce n’est pas un hasard) mais je ne peux que m’en réjouir. J’appelle de tous mes vœux les 27 qui restent à repenser leur union de façon à corriger tout ce qui ne va pas dans cette Europe ouverte à tous les vents avant que les peuples ne se réveillent dans de nouveaux – et peut-être violents – “exits”. Ce soir, pour la première fois depuis bien longtemps, je me sens anglais !