L’inconscient des cabanes et le Baron perché

C’est intéressant de noter à quel point les cabanes perchées travaillent notre inconscient.

On a vu que pour l’ami Alain Laurens, puisque tel est le nom de l’homme étonnant que j’évoquais l’autre jour, c’est par un rêve au cours d’une sieste qu’elles ont fait irruption dans sa vie. Il n’eut de cesse ensuite de se trouver un associé: quelqu’un qui saurait l’aider à faire des plans, travailler le bois, et monter en haut des chênes, des hêtres, des platanes. Car seul il ne possédait aucune des compétences requises pour son entreprise. Mais la cabane avait pris possession de lui, comme un retour vital à l’enfance, à la nature, à la joie simple et forte de grimper aux arbres.


Pour moi, je n’ai pensé à notre rencontre que superficiellement au cours des mois qui ont suivi. Même au moment du brief à Kikko, je ne réalisais pas pleinement ce que nous étions en train de nous dire. C’est l’inconscient qui parlait. Celle qui m’a ouvert les yeux, c’est ma femme, avec la lecture toute récente du Baron perché. J’avais lu quelques livres d’Italo Calvino, mais pas celui-là. Claudine, depuis longtemps, insistait pour que je le lise. Mais toujours une autre priorité littéraire prenait le pas sur lui. En fait, je l’ai lu après que Kikko nous eut remis sa première maquette. La vie fait sans doute bien les choses: j’étais mûr.

Ce conte éblouissant m’a réjoui au-delà de ce que je saurais exprimer. Pour échapper à un potage d’escargots (quoi de plus rampant, baveux, pluriel, et terre à terre que les gastéropodes?), le jeune baron Côme Laverse du Rondeau (il a douze ans) quitte la table familiale et grimpe dans la grande yeuse du parc. C’est un endroit qu’il connait bien pour l’avoir maintes fois fréquenté en compagnie de son frère cadet. Ils y passaient “des heures et des heures (…) pour le plaisir de regarder le monde au-dessous de nous en faisant des farces et en poussant des cris à l’intention de ceux qui passaient à terre”. Il n’en redescendra plus.

Faire des farces et pousser des cris à l’intention de ceux qui passent à terre: les étonner, les surprendre, les déranger un instant dans leur marche, leur faire lever les yeux, les inciter à regarder un plus haut que leurs pieds, et pour finir les faire sourire, ou hausser les épaules, ou bougonner, ou rêver… Chanter sert précisément à ça.

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maurice joyeux

C’est la cabane du veilleur ! pas du pêcheur ni du pécheur ni du prêcheur ! KOURNIAZOMAI : je me perche , en grec …