The road not taken

Elle avait filé sans rien dire, en pleurant. Je l’avais vue se mettre à courir en descendant le chemin qui part de notre maison, et tourner en bas sur la route. Pendant une trentaine de secondes, j’étais demeuré immobile, à me demander quoi faire, puis j’avais enfilé mes chaussures, noué soigneusement les lacets, et je m’étais lancé à sa poursuite.

A deux cents mètres de l’entrée de notre propriété, la route arrive au fond d’un vallon, et se sépare en deux. A gauche, elle fait tout de suite un virage, et remonte sur plus de deux kilomètres à travers les champs et les vignes, en se transformant en chemin. A droite, elle traverse le ruisseau, et part en raidillon sur le versant opposé, sous de vieux chênes. D’un côté comme de l’autre, on perd assez vite son mince ruban de vue. J’étais arrivé à cette fourche, et je ne la voyais pas. Quelle direction avait-elle pu prendre ? Pas de trace de pas pour me mettre sur sa piste. Pas d’autre bruit que celui du vent.

Il m’est venu à l’esprit les lambeaux d’un poème de Robert Frost. The road not taken. La route qu’on n’a pas prise. C’était cela, la bonne question. Quelle route n’avait-elle pas prise ? Celle, sans doute, que nous empruntions le plus souvent. Je suis parti à gauche. Passé le virage, ça grimpait fort. Puis la vue s’est dégagée et je l’ai aperçue au loin sur la hauteur. Elle courait toujours mais commençait à peiner. Le chemin devant elle montait encore un bon moment.

La rattraper devenait une question de patience.

Apres Andribon

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