Rambuteau et les vespasiennes

A Paris, il y a encore des colonnes Morris et quelques fontaines Wallace. Il y eut autrefois les colonnes Rambuteau.

Rambuteau, qui fut préfet de la Seine sous Louis-Philippe, avait résumé sa mission dans une formule : apporter aux parisiens « de l’eau, de l’air et de l’ombre ». Il fit plus encore : il leur apporta des urinoirs. Il en fit installer 450, dans des colonnes, auxquelles les Parisiens donnèrent instantanément le nom de rambuteaux.

colonne rambuteau

Contrairement à son successeur le préfet Poubelle, qui laissa généreusement son nom au récipient qu’il inventa pour évacuer les ordures ménagères, le préfet Rambuteau était contrarié par cette antonomase. Il eut l’esprit de faire savoir que le premier à avoir équipé une cité en urinoirs publics avait été l’empereur Vespasien, à Rome, vers l’an 70, de sorte qu’on ne tarda pas à renommer ces édicules des vespasiennes, et que le nom du préfet n’en fut pas sali.

Précisons que Vespasien, contrairement à Rambuteau, avait rendu payante l’utilisation de ces toilettes publiques, fournissant au passage à M. Decaux l’exemple dont ce dernier s’inspirera pour nos modernes sanisettes. Le fait de taxer l’urine n’alla pas sans poser un cas de conscience à certains Romains. Le propre fils de Vespasien, le futur empereur Titus, trouva notamment que son père était tombé bien bas. Le père lui mit alors sous le nez quelques pièces d’argent qui provenaient de cet impôt.  — Est-ce que ça sent quelque chose ? l’interrogea-t-il. — Non. — Ça sort pourtant de ce liquide ! Tu vois, Titus, l’argent n’a pas d’odeur.

(Je tire l’essentiel de mes informations sur ce passionnant sujet du blog Parisian Fields, que tiennent deux nord-américains amoureux de Paris: https://parisianfields.wordpress.com/2016/01/31/vespasiennes-does-a-roman-emperor-deserve-this-2/)

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