On entre dans l’histoire à tour de bras, ces temps-ci. Il suffit d’être sportif. Et en ce moment, de préférence rugbyman, puisque c’est la Coupe du Monde.
Le Japon, nous a-t-on dit, est entré dans l’histoire il y a dix jours pour avoir battu l’Afrique du Sud. J’avais le sentiment que le Japon était entré dans l’histoire depuis longtemps, notamment pour avoir battu les Russes en 1905, la Mandchourie, en 1931, et dans la foulée la Chine, puis la plupart des pays d’Extrême-Orient. « — Ne jouez pas sur les mots, Arbon ! Il faut entendre : dans l’histoire du rugby. » Soit. Mais ce que je lis ou entends, c’est bel et bien dans l’histoire. Attention aux hyperboles.
Avant-hier, a-t-on également appris, c’est la Namibie qui est à son tour entrée dans l’histoire (précisons donc : du rugby). Aurait-t-elle aussi battu une grosse équipe ? Les All Blacks ? Les Pumas argentins ? Non, mais pour la première fois dans un match de Coupe du Monde, elle a marqué trois essais, alors que son record était de deux. C’était face au Tonga, et elle s’est inclinée. Mais ma lecture m’informe qu’elle était également à deux doigts de marquer son premier point dans cette compétition. Je songe que quand elle y parviendra, elle entrera à nouveau dans l’histoire, et qu’il faudra alors y mettre un H, grand comme des poteaux de rugby.
Capture d’écran de la recherche d’images Google correspondant à « Entrer dans l’histoire ». Que des sportifs, et un Obama.
Eh oui, on entre à présent dans l’histoire pour jouer dans la cour des grands durant la trêve des confiseurs ! On a, je le pense, les journalistes qu’on mérite. Henri Jeanson, qui n’avait pas sa langue dans sa poche, déclara un jour : “Un exemple de dévaluation : avant la guerre, “Gros Léon”, c’était Léon Daudet, et aujourd’hui c’est Léon Zitrone ! Que ne dirait-il pas en comparant nos journalistes d’aujourd’hui à Zitrone qui, lui au moins, était cultivé et parlait je ne sais combien de langues dont le russe…