« C’Ă©tait, me raconte-t-il, par un jour d’hiver, pluvieux, froid, morfondu. Ma mère Ă©tait en train de mourir, et elle avait commandĂ© le notaire, pour rĂ©diger son testament. Elle habitait près du bois, et lui, parce que ce jour-lĂ les transports en commun Ă©taient en grève, n’avait pas eu d’autre choix que de venir Ă pied. Il est arrivĂ© trempĂ© jusqu’aux os. Quand il est entrĂ©, les cheveux mouillĂ©s et la peau rosie, dans la pièce oĂą se tenait ma mère, elle l’a regardĂ© longuement, avec envie, et lui a dit : — Vous venez de traverser le bois sous la pluie ? Quelle chance vous avez, maĂ®tre, quelle chance ! »
Quand il me raconte ça, mon voisin et moi nous venons de nous croiser dans une allĂ©e du bois de Boulogne, en tenue de sport, sous la pluie, et s’il me confie cette histoire intime, c’est que je lui parais digne de la recevoir, parce que je suis capable du plaisir de courir quand il pleut.