Vanves

Pour en terminer avec la courte série d’articles évoquant ma période vanvéenne, voici la chanson majeure de l’époque, écrite au début de 1982. Je n’en ai pas retrouvé d’enregistrement, juste le texte. J’avais vingt-huit ans, et la conscience aiguë que je faisais fausse route, sans pour autant vouloir véritablement en changer.

Hommage à la ville de Vanves
Hommage à la banlieue
Tous ces quartiers neufs qui mélangent
Le béton les p’tits vieux
Un urbanisme à ras de terre
Glissant dans la nuit bleue
Reflets noirs dans la vitre en verre
Tu viens de voir tes yeux

Qu’est-ce que tu fous là solitaire
A regarder passer
Les camions les nuages clairs
Les programmes de télé
Es-tu content d’être tranquille
Le cul dans ton fauteuil
Est-ce que Vanves plutôt que ta ville
Serait pas ton cercueil

Le cercueil de tes exigences
De ta fidélité
A tes derniers rêves d’enfance
Déjà bien amochés
Réfléchis : est-ce que par hasard
Tu s’rais pas résigné
A vivre une vie sans autre histoire
Que sa banalité

Tu disais je serai célèbre
Ecrivain renommé
Je mettrai l’avenir en gerbe
Au creux de mon papier
Bien sûr t’as jamais voulu être
Ni Balzac ni Hugo
Mais la Fontaine un peu peut-être
Et peut-être Rimbaud

Mais quand t’as fini tes études
T’as fait comme les copains
Sans enthousiasme sans inquiétude
T’es monté dans le train
Te voilà cadre dynamique
A dix mille francs par mois
Dans l’industrie pharmaceutique
Youpi ! Ça marche pour toi

Ça marche oui mais de travers
Tu es bien trop payé
Pour désirer tout foutre en l’air
Et tu l’es pas assez
Pour ne pas rêver d’autre chose
L’aventure et l’amour
Et regretter les lèvres roses
Des jours entre les jours

Où sur un arbre centenaire
Ton nom se fiançait
A celui d’une fille claire
Vos deux cœurs enlacés
Petits symboles romantiques
Aujourd’hui effacés
Par des graffitis politiques
Et des obscénités

Ainsi passent les années belles
Sombrent les destinées
Entre la finance et la vaisselle
Dans Vanves hallucinée
T’auras jamais de Rolls blanche
Tes parents vont mourir
T’es qu’un poète du dimanche
Tu commences à vieillir

C’était il y a trente-et-un ans. Je n’ai jamais eu de Rolls blanche, j’ai commencé à vieillir. Mais mes parents sont toujours là. On fête aujourd’hui même les quatre-vingt-huit ans de Maman.

Maman-et-Raphael.jpg

Bon anniversaire, Maman !

S’abonner
Notification pour
guest

1 Commentaire
Le plus récent
Le plus ancien Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
jacques langlois

Un très bon anniversaire à elle!…