“Quand j’ai eu dix-huit ans, Uncle Sam m’a dit qu’il aimerait bien mettre un uniforme sur mon dos pour aller combattre un gars qui s’appelait Adolf. Ce que j’ai fait.”
Voilà. C’est ainsi qu’un jour les dés sont jetés, et que les circonstances vous précipitent dans des aventures involontaires et un tourbillon de rencontres dues en grande partie au hasard. Elles forment pourtant le matériau d’une vie. La guerre d’Alan est basée les souvenirs d’Alan Ingram Cope, citoyen des Etats-Unis d’Amérique né en 1925 dans la banlieue de Los Angeles, mort en France sur l’île de Ré en 1999. On y trouve principalement ses souvenirs de guerre et de jeunesse, mais pas uniquement. On y trouve également ceux d’épisodes beaucoup plus tardifs, de l’époque (passée la cinquantaine) où la jeunesse se revisite, s’évalue, et finalement, peut-être, se comprend.
Car au fond, guerre ou pas guerre (mais la guerre le montre de façon paroxystique), la vie est une succession de contingences absurdes ou nécessaires, de faits qui n’étaient pas obligés de se produire. Mais ils se sont produits, et toute la discrète magie de ce livre est de faire ressentir la manière lente et silencieuse avec laquelle nous en faisons le tri, pour découvrir parmi eux ceux qui réellement nous déterminent, et dont nous décidons au bout du compte que oui, vraiment, ils nous appartiennent.
On dirait l’incipit d’une pièce antique – la Guerre de Troie, le choix d’Oreste ou celui d’Antigone : d’un coup de dés les dieux y jouent notre destin drapé (s) dans le manteau du hasard.
Mais est-elle vraiment modeste la destinée, ce bel enfant de la liberté et du hasard ? Ou toute pleine d’imprévu – accidents heureux et malheureux- folle équipée, capricieuse, audacieuse,
vertigineuse !
Je me souviens vaguement du début d’une phrase sur ce thème, un truc comme ça : « Le destin entre dans nos vies avec des semelles de feutre ».
Comme celles du méchant des Artistochats,
ses bottines grincent parfois.
Le hasard est le nom que prend le destin quand il se veut modeste…