C’est une fascinante expérience de théâtre que celle qui permet de découvrir un livre et son auteur.
Il se donnait à Avignon cet été “La détresse et l’enchantement”, tirée de l’autobiographie de Gabrielle Roy (1909-1983), qui est réputée être le plus grand auteur canadien français du XXè siècle.
Une femme raconte ses origines, les déracinements successifs de ses grands-parents et parents, du Connecticut au Québec, et du Québec au Manitoba; sa jeunesse, la pauvreté de sa famille, la condition de citoyens de seconde zone de leur petite minorité francophone; ses années d’institutrice, et son départ pour l’Europe: Paris, Londres, la Provence, dans les dernières des années 30. Le voyage, initiatique comme tous les longs voyages que font à cet âge les esprits sensibles et élégants, sera pour Gabrielle Roy à la fois une éducation sentimentale et la découverte de sa vocation.
Tout est raconté de façon simple, limpide, sans lyrisme, sans emphase, et le pari réussi de la mise en scène (de Laure-Marie Lafont, qui interprète également le rôle) est de ne pas “dramatiser” ce beau et pourtant banal parcours. Il n’y a rien à enjoliver, rien à exacerber. Gabrielle Roy est comme une fleur qu’elle nous donne à voir, dans sa lumineuse et naturelle beauté, avec ce “mélange inextricable de détresse et d’enchantement” dont se tisse une existence humaine.