Bobines perdues

Des portions de ma vie défilent sous mes yeux. Ce sont comme des rushes, des bouts d’essai. Est-ce que ça fait un film ? Non. Il faudrait élaguer, couper au montage, et tourner à nouveau certaines scènes pour lesquelles il avait bien fallu (mais c’est pareil pour tout le monde) se contenter d’une seule prise.

A quoi cependant cela servirait-il ? A rien. Je ne vois pas que ça puisse intéresser grand monde en dehors de moi. Je n’ai pas abordé ma vie comme un spectacle. Quand j’en revois des extraits, ils me paraissent dans l’ensemble paisibles et agréables. Avec un regard critique on pourrait regretter que le scénario n’ait pas été plus riche en aventures, et que le personnage principal n’ait pas fait preuve de davantage d’ardeur, de brio, ou de ténacité. Soit. Mais j’ai eu une vie assez pleine, et je n’ai jamais cherché à réussir ni à ce qu’on me trouve admirable. J’ai surtout essayé d’être heureux.

Ce qui me frappe cependant, pour poursuivre la métaphore du film, c’est le nombre de bobines perdues. Tant d’épisodes dont les images se sont effacées, tant de personnages dont il ne subsiste rien, tant de semaines, de mois, d’années même dont la trace disparaît dans le grand dissolvant de l’oubli.

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