Un ami très cher vient de m’apprendre le décès de sa mère. Elle avait quatre-vingt-dix-neuf ans. Il y avait longtemps qu’elle était très faible, mais la vie ne la quittait pas, et elle n’essayait pas de s’en décrocher. C’était à la nature de lui faire franchir le pas. Alitée, somnolente, à la pointe extrême de l’âge, elle attendait.
Je suppose que nous ferons presque tous comme elle : si Dieu nous prête vie, nous ne l’abrègerons pas. Rares sont ceux qui choisissent de décider du moment. La Rochefoucauld dit la chose de façon très dure, mais il a raison : « Peu de gens connaissent la mort. On ne la souffre pas ordinairement par résolution, mais par stupidité et par coutume ; et la plupart des hommes meurent parce qu’on ne peut s’empêcher de mourir. »