Surnaturels

​La scène se passe dans un train de banlieue. La femme, d’âge mûr, est habillée d’un chemisier trop serré et d’une jupe bien trop moulante. Face à son miroir de poche, elle complète un maquillage déjà fort abondant.

En même temps qu’elle se peint les lèvres avec un gloss rose démesurément flashy, elle adresse la parole à un petit monsieur grisâtre qui l’accompagne et qu’on pourrait prendre pour son factotum. — Tu comprends, lui dit-elle d’une voix forte (son français roule les r, ce n’est évidemment pas sa langue maternelle, je situerais plutôt ses origines du côté des Balkans), nous devons être surnaturels.

Le petit monsieur ouvre de grands yeux étonnés mais opine de la tête en regardant ses chaussures. — Tu vois ce que ça veut dire, surnaturel, n’est-ce pas ? — Bien sûr, rétorque-t-il. Il soupire. (Lui non plus le français n’est pas sa langue naturelle.) Il ne veut surtout pas d’ennuis. On ne lit sur son visage que de la banalité résignée et de la soumission ordinaire, alors il continue à secouer positivement le crâne : — Surnaturel, bien sûr, tu peux compter sur moi.

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