L’art du concret

Mon grand-père professeur était originaire d’un village des Landes. Dans les années 30, il donna à plusieurs enfants du lieu des cours particuliers, et notamment au fils du patron du bistrot-restaurant.

Ce garçon avait quelques difficultés à l’école en calcul: il n’arrivait pas à effectuer une addition de plus de deux termes. 15+12+8+22 était pour lui, ainsi posé, un problème si abstrait qu’il en devenait insoluble.

Mon grand-père lui dit:
– Imagine, Jeannot. Tu es en train d’aider ton père dans le service. Charles, Paul, Jean et René viennent boire l’apéritif.
– Oui, ils viennent presque tous les jours.
– Bon. Charles commande un pastis à 15 francs, Paul un dubonnet à 12, Jean un verre de vin à 8, et René une Suze à 22. Combien te doivent-ils?
– Facile ! 57 francs.
Dubonnet.jpg

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maurice joyeux

Moi, je trouve que tu donnes là un bel exemple de l’importance et de la saveur salvatrice du langage en paraboles !

Jacques Langlois

Eureka! La désormais fameuse, bien que toujours anonyme, secrétaire de rédaction qui s’emberlificota naguère dans une soustraction à deux éléments pour déterminer l’âge du décès de Boris Vian, est
un parfait contraire de ce brave Jeannot. Elle n’est à l’aise que dans l’abstrait: si on lui avait demandé combien fait 1959 -1920, elle aurait répondu 39 sans hésiter. Mais voilà: on l’a
embrouillée en lui parlant de date de naissance, de date de mort et d’un monsieur qui s’appelait Boris Vian. Trop concret pour elle!
Ce contre-exemple, on l’aura compris, est un prétexte pour refaire un petit coup de pub sur ce site au livre de Claudine.
Et il me permet en outre, puisqu’on parle ici de publicité et là d’un débitant de boissons, de rappeler une anecdote à propos de ce plaisantin de Boris: cherchant à arrondir des fins de mois
difficiles, notre génial touche-à-tout s’essayait aussi à la réclame. C’est ainsi qu’il proposa un jour le slogan suivant: “Evian, l’eau des Vian!”. Slogan refusé par l’annonceur, qui avait courte
vue…