Le curé et le mort (ou comment tuer un homme après sa mort)

« M. de Boufflers a tué un homme après sa mort. Il était dans sa bière et en carrosse, on le menait à une lieue de Boufflers pour l’enterrer ; son curé était avec le corps. On verse ; la bière coupe le cou au pauvre curé. »

Cet insolite – mais véridique – accident, conté par Madame de Sévigné dans une de ses célèbres lettres à sa fille, a inspiré à La Fontaine la fable Le curé et le mort (qui vient, dans le livre VII, juste après La laitière et le pot au lait). J’aime l’impertinence charmante avec laquelle y est décrite l’humeur du curé, au cours de ce voyage que le saint homme n’imagine pas comme étant son dernier : installé à côté de son paroissien « bien et dûment empaqueté », son esprit vagabonde, et entre deux prières, il médite sur l’emploi qu’il fera de l’argent que l’inhumation va lui rapporter : achat d’une feuillette de vin, emplette de cotillons pour sa nièce et sa chambrière… Hélas, écrit La Fontaine, « sur cette agréable pensée, un heurt survient ».

Notons que cette histoire dément quelque peu la vision idéalisée des Funérailles d’antan telles que les chantait Brassens. Pas besoin d’aller à 140 à l’heure pour que le mort fasse des petits.

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