Je dois Ă GĂ©rard PrĂ©vost cette merveille de “non-sense”, oĂą l’absurde finit par se multiplier par lui-mĂŞme. C’Ă©tait, me dit-il, l’une des plaisanteries les plus en vogue parmi les membres du Grand Orchestre du Splendid (dont il est l’un des fondateurs). Pour dĂ©signer quelqu’un qui s’exprime mal, on le compare donc Ă un maĂ®tre de notre langue, et on arrive Ă signifier le contraire de ce qu’on dit…
Petite explication Ă l’usage de mes lecteurs qui ne saisiraient pas la subtilitĂ© de la blague : l’expression d’origine, “parler français comme un basque espagnol” – c’est-Ă -dire baragouiner un français infâme, je ne sais pourquoi les basques espagnols ont cette rĂ©putation -, devient par assimilation phonĂ©tique “parler français comme une vache espagnole” (ce qui renforce le propos). En poussant encore d’un cran, et en substituant Marcel Pagnol Ă “vache espagnole”, on atteint Ă cette grandiose et paradoxale formulation. La langue de Marcel Pagnol devient le degrĂ© zĂ©ro de la langue de Molière.
Notons qu’au Spendid, ils sont allĂ©s encore plus loin : l’assimilation “vache” et Marcel Pagnol Ă©tant acquise, et les vaches Ă©tant connues pour pisser dru, ils disaient, les jours de mauvais temps: “Il pleut comme Marcel Pagnol”.
En revanche, dire que l’on parle anglais comme Marcel Pagnol serait malvenu, puisque la profession de celui-ci Ă©tait d’enseigner cette langue. Reste Ă savoir si son accent mĂ©ridional faisait bon
mĂ©nage avec les intonations propres Ă nos voisins d’Outre-Manche.